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Comprendre un message, c’est le décoder. Le langage est un code. Or, tout décodage est un nouvel encodage.
Si vous me dites quelque chose, je vérifie que j’ai bien compris votre message en vous le redisant avec mes propres mots, c’est-à-dire avec des mots différents de ceux que vous avez utilisés, car si je répète exactement vos paroles vous ne saurez pas si je vous ai vraiment bien compris.
En même temps, si j’utilise mes propres mots, cela implique que j’ai changé votre sens, bien que très légèrement ; et à supposer même que, vicieusement, je vous renvoie votre message mot pour mot pour vous dire que je l’ai bien compris, cela ne garantirait nullement que j’ai enregistré le même sens que vous dans ma tête, car j’apporte à ces mots une expérience différente du langage, de la littérature et de la réalité non verbale, si bien que ces mots ont pour moi un sens différent de celui que vous leur donnez.
Et si vous pensez que je n’ai pas compris le sens de votre message, vous ne vous contentez pas de le répéter avec les mêmes mots, vous essayez de l’expliquer avec des mots différents, différents du moins de ceux que vous aviez utilisés à l’origine ; mais alors votre message n’est plus exactement le même que celui que vous vouliez transmettre au début.
Et, de ce fait, vous n’êtes plus, en tant que sujet parlant, celui que vous étiez au début.
Il  s’est écoulé du temps depuis que vous avez ouvert la bouche pour parler, les molécules de votre corps ont changé, ce que vous vouliez dire a été remplacé par ce que vous avez effectivement dit, et fait maintenant partie intégrante de votre histoire personnelle que votre mémoire a enregistrée très imparfaitement.
La conversation est en somme une partie de tennis qu’on joue avec une balle en pâte à modeler qui prend une forme nouvelle chaque fois qu’elle franchit le filet.