Q190 | De l’idéation au pivot de la start-up : comment la méthode des « petits pas » permet d’ajuster le business model ?

19 janvier 2024
6 mins de lecture
Innovation et créativité : Brainstorming en groupe devant un tableau blanc géant rempli de notes autocollantes colorées et de croquis. Créé avec une AI Générative.

Complexe, instable et incertain comme jamais, notre monde est à bout de souffle. Entre crise passive et métamorphose, le chaos semble nous mener vers la réinvention. Et si la création d’un futur résilient commençait par réinventer notre perception du présent ?

Le gaspillage alimentaire et non-alimentaire sont une aberration de notre société. Le débarras et la space détox se révèlent être une piste de lutte contre le gaspillage au sein des espaces intérieurs, ayant un impact direct sur l’écosystème environnemental et sociétal. Spacee est une jeune start-up dont l’ambition est de valoriser le métier invisible et déconsidéré des professionnels du débarras, fondée sur une innovation d’usage et appuyée par une expérience digitalisée.

 

Quand la fin annonce un début.

15 ans. C’est le nombre d’années passées en entreprise comme salariée. En 2021, je quitte une organisation tournée vers des pratiques d’un autre temps. Je décide que les prochaines années seront tournées vers l’impact positif, acceptant que la création de valeur prend du temps.

 

De l’idéation au pivot de la start-up : comment le futur tend la main au présent ?

De la phase d’idéation à celle du « go-to market », de nombreuses étapes, actions et rencontres animent la construction et la maturation d’une proposition de valeur.

Quand celle-ci a une ambition tournée vers les enjeux sociétaux et environnementaux d’aujourd’hui et de demain, la consultation des différentes parties prenantes nous amène vers le chemin de l’évolution et la transformation des paradigmes.

C’est ainsi qu’un métier vieux comme le monde (ou presque), invisible et dévalorisé intègre une place de choix pour accompagner les défis liés au gaspillage non-alimentaire.

1- Prise de conscience

La prise de conscience du besoin de changement éclot au travers de la confrontation avec le présent. C’est dans le cadre de mes premiers pas au sein du parcours EMBA de l’emlyon que commence cette confrontation. Cette formation pour cadres et dirigeants d’entreprise débute par un module intitulé « Futurs Durables », animé par Thomas Gauthier, Professeur, Doyen associé, Titulaire de la chaire Carbone 4 « Stratégie en Anthropocène » à emlyon business school.

D’un état des lieux de la situation environnementale à l’échelle mondiale, en passant par une étude de cas concret d’organisation, s’appuyant sur la méthodologie de la prospective, ce module est riche de sens. Percutant, il est aussi et sutout un puissant outil de prise de conscience et se révèle être un allié précieux encourageant le passage à l’action.

2- Exploration

Cette phase chaotique et tumultueuse est définitivement celle qui permet d’ouvrir le champ des possibles et d’y percevoir des opportunités auxquelles nous n’aurions pas pensées. Mon point de départ part d’une aberration et d’un constat assez simpliste : le gaspillage.

Méthodologie et outils exploratoires en poche (de la prospective en passant par le design thinking), un travail de recherche, des centaine d’interviews auprès de publics divers, d’expérimentations et d’analyse me mènent vers un début de problématique : celle de l’encombrement des espaces intérieurs et de tout l’écosystème qui l’entoure. A ce stade, plusieurs scénarii sont possibles. Lequel choisir ?

Le choix se porte sur une première solution orientée exclusivement sur la gestion de la fin de vie des textiles, qui, nous le verrons, évoluera rapidement vers un autre scénario, non envisagé à ce stade.

3- Exploitation et re-exploration

Les résultats de cette exploration mènent vers la formalisation d’un business model qu’il convient de tester : le go-to market. La concrétisation et l’effectuation des actions sont accompagnées de boucles itératives qui confirment certains points du modèle économique…et qui en réfutent d’autres. Cette phase est aussi précieuse d’enseignements que frustrante d’incertitude.

Alors que les tendances, le marché, les chiffres, les interviews nous mènent vers des « certitudes », la confrontation au marché, elle, nous mène vers des faits irréfutables soutenus par des signaux qu’il convient d’analyser.

Fort de ces éléments, la méthodologie du design thinking permet alors de faire un pas de côté pour prendre du recul et (re)challenger la proposition de valeur en lien avec l’expérimentation terrain. De la formulation à la reformulation de la problématique traitée, en passant par le suivi pas à pas de chaque partie prenante, les étapes de redécouverte sous un nouvel angle permettent de redéfinir la problématique et de mieux identifier les challenges associés.

En gardant le lien avec la vision initiale du projet, cette seconde boucle affine la proposition de valeur et le prototype.

La différence majeure de l’ajustement (pivot) du produit est qu’il est coconstruit avec les parties prenantes, proches et éloignées, qui utiliseront les services de Spacee.

4- Changement de cap : passage à l’acte

Après le lancement de Spacee, en avril 2023, nous pensions – comme (presque) tous les entrepreneurs – que notre idée était géniale 😉 Nous savions également que le marché nous dirait vite la vérité…si on voulait bien l’écouter !

Nous l’avons écouté. Attentivement.

Les retours nous ont chamboulé car même si nous pensions résoudre le problème de l’encombrement textile et son impact sur l’environnement, nous avons pris conscience que nous étions trop loin de ce que le marché demandait. A ce stade, nous avions alors deux options :

  • Insister, car notre idée est géniale 😉
  • Se mettre autour d’une table et rejouer les cartes…différemment

Alors que j’étais la fondatrice initiale, porteuse du projet, mes associés ont pris une nouvelle posture, précieuse. Celle de co-fondateurs, participant activement à la stratégie de Spacee. Nous avons passé près de 2 mois à repartir de 0. Mais pas seuls. Nous avons été accompagnés par un expert en design thinking, Alain Fargeon, Responsable pédagogique « Faire converger business et impact positif » à l’emlyon, qui nous a aidé à (re)traverser plusieurs étapes :

  • Quel est le problème que nous cherchons à résoudre ?
  • Pourquoi ?
  • Pour qui ?
  • Comment ?

Se reposer toutes ces questions quelques mois après la phase du « go to market » est difficile. Faire un pas de côté et challenger toutes les étapes du projet que l’on pensait déjà actées, est un exercice qui demande de l’humilité, de l’écoute, du temps et une sincère remise en question.

Sur ces premières questions, la méthode du « double diamant » nous a aidé à :

  • OBSERVER, SE METRE A LA PLACE DE…COMPRENDRE
    • Brainstormer et re-poser le problème en mode « post-it »
      • Verbatim
      • Constat
      • Chiffre
      • Question, etc…
  • VISUALISER, PROPOSER
    • Catégoriser toutes ces idées
    • Prioriser les thématiques
    • Définir le parcours utilisateur avec lui
    • Co-construction avec les parties prenantes : échanges, rencontres
  • DEVELOPPER, CO-CONSTRUIRE
    • Designer la solution
    • Développer le prototype (MVP)
    • Supprimer tout le superflu non utile au lancement

Cette étape est la plus précieuse car c’est celle qui concrétise en grande partie la proposition de valeur. Le prototype a été développé en collaboration avec les parties prenantes, incluant des questions simples : comment pouvons-nous faciliter votre travail ? Entre échanges, création de maquettes, tests, cette étape est faite de nombreux ajustements itératifs.

  • IMPLEMENTER, LANCER
    • Tester la solution avec un échantillon réduit
    • Ajuster le prototype en fonction des retours
    • Déployer par priorisation des cibles
Divisé en quatre phases distinctes – Découvrir, définir, développer et livrer – le double diamant est une carte visuelle du processus de conception. Source : onopia.com

Ce processus a été suivi pour 2 scénarii différents sur lesquels nous hésitions (cible BtoB ou BtoC). Nous avons alors opté pour celui qui est le plus simple à implémenter, à tester et surtout, celui qui nous permettra rapidement de développer notre chiffre d’affaires.

Conclusion

Qu’il s’agisse d’imaginer ou créer des projets futurs, l’approche du design-thinking aide à comprendre, façonner et formaliser plusieurs scenarii possibles tout en permettant de concevoir des produits et services connectés aux enjeux environnementaux et sociétaux.

L’exploration et l’exploitation conduisent vers des boucles itératives d’ajustement permanent, que nous appelons chez Spacee, « l’art de zigzaguer ».

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