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Q206 | Que nous apprend la fenêtre d’Overton en prospective ?

3 mins de lecture
Source de l'illustration : Le fil d'Arianne : Penser l'impensble

Il serait facile de dire que j’ai eu connaissance de la fenêtre d’Overton en lisant un livre sur la politique, mais la réalité est que j’en ai entendu parler pour la première fois en regardant la série La Fièvre (que j’avoue avoir beaucoup apprécié, mais cela est totalement subjectif !)

Si le contexte n’est pas nécessairement politique, le concept d’une fenêtre qui change de taille et se déplace s’adapte extrêmement bien aux idées prospectives que l’on souhaite transmettre aux différentes parties prenantes du dispositif. Je dirais même que celle-ci présente la stratégie à adopter permettant de passer de l’imagination à l’action.

La fenêtre d’Overton légèrement adaptée au dispositif de prospectif

Deux moments sont propices à l’usage de ce concept, le premier lorsque l’on présente des futurs possibles et leurs enseignements, le deuxième lorsque l’on passe à l’action.

La fenêtre d’Overton et les enseignements des futurs

Lorsque pour la première fois, vous allez présenter une idée ou un concept sortant un tant soit peu de l’évolution linéaire de ce à quoi nous sommes habitués – le futur de XYZ sera toujours XYZ tel que nous le connaissons mais en mieux – il y a de fortes chances que vous ne serez pas pris au sérieux.

Que cela se matérialise par un scénario, un produit de design-fiction, un récit ou d’un jeu et ce quel que soit le résultat, le premier pas aura été franchi : vous aurez présenté l’impensable ou l’imaginaire, vous aurez planté cette petite graine dans le cerveau de vos parties prenantes, et celles-ci y auront été exposées pour toujours.

La suite des étapes est telle que présentée sur Wikipedia et ce sera à vous de convaincre et trouver les outils appropriés (ateliers, conférences, études exploratoires, etc. ) pour arriver à vos fins. Parfois, les thèmes se développent également à l’extérieur de votre organisation et un décalage peut avoir lieu entre l’état de la fenêtre d’Overton à l’extérieur et à l’intérieur de celle-ci.

Un exemple prospectif me venant à l’esprit dans le domaine de la défense est celui des systèmes autonomes connus comme des « robots tueurs ou SALA ». Présentés comme une menace par Noel Sharkey en 2012, cela a réveillé l’attention du public générant une multitude d’articles utilisant comme illustration le robot du film Terminator

L’impensable consistant à avoir des armes autononmes sur le champ de bataille venait de faire son apparition dans l’imaginaire collectif.

En 2017 le film Slaughterbots (design fiction) contextualisait la chose avec l’usage de drones aériens.

Aujourd’hui, avec les images de la guerre en Ukraine, l’usage de l’Intelligence Artificielle dans les drones pour la reconnaissance automatique de cibles ne choque plus personne. Nous sommes donc dans la phase populaire, si ce n’est implémentée.

Video Slaughterbots (2017) – littéralement « Les robots d’abattage »

Il est difficile d’imaginer ce qui se serait passé si la levée de boucliers de 2012 n’aurait pas eu lieu, mais les imaginaires présentés ont été vus comme des opportunités pour certains et des menaces pour d’autres. 

14 ans plus tard, l’impensable est devenu réalité et le futur de la robotique bénéficie d’un tout autre regard.

La fenêtre d’Overton et le processus de transition

Les états de la fenêtre d’Overton sont également liés aux sentiments du processus du processus de transition qui ne manquera pas de s’enclencher au sein de l’organisation.

L'être humain est au coeur du changement qui provoquera en lui une multitude de sentiments différents tout au long du parcours. Ceux-ci n'apparaissent pas dans un ordre précis, mais le passage au travers de bon nombre d'entre eux sera nécessaire pour mener à bien la transition de l'ancien état au nouvel état.

En fonction du type d’échanges que le dispositif de prospective entretient avec ses différentes parties prenantes, il serait bienvenu d’anticiper certains thèmes auprès de la hiérarchie. 

Cela aurait pour but que les premiers sentiments que sont le déni, l’anxiété, le choc, la résistance, la peur, soient évacués lorsque nous nous trouvons dans l’acceptable / raisonnable. Grâce à cela, il serait possible de préparer transition optimale qui devrait nécessairement coïncider avec les états populaire et implémentation.

Il y a certes le risque d’être en avant sur son temps, mais de nouveau, une veille active permet de coller à la réalité terrain.

Rappelez-vous que pour que vos idées et ce que vous présentez soient le plus rapidement mis en action par les différents acteurs, il faut que celles-ci deviennent les leurs le plus rapidement possible !

Et vous, comment préparez-vous vos différentes parties prenantes à vos idées novatrices, ou tout simplement, au changement ?

N’hésitez pas à laissez votre avis ci-dessous ou, pourquoi pas, à rédiger un billet sur votre façon de faire !

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5 Comments

  1. Dans mon expérience, ce processus de transition peut être significativement accéléré en partageant régulièrement des informations et des cas concrets issus d’industries plus avsncées. Une veille active et la diffusion des avancées des premiers adoptants du même secteur (souvent les startups!) est aussi une méthode éprouvée pour convertir un futur impensable en une réalité largement acceptée.

    • Bonjour Frank,
      merci pour votre message !
      Le diable étant dans le détail, pourriez-vous en dire plus sur comment le « partage » ainsi que la « diffusion » s’effectuent ?
      Très cordialement,
      Quentin

  2. Un nouveau billet de Quentin Ladetto autour de la fenêtre d’Overton appliquée aux enjeux de hashtag#prospective, qui doit également interpeller les porteurs de dynamiques de hashtag#veille.

    Dans les processus de hashtag#veille, il est plutôt d’usage de surveiller, détecter et d’analyser les mouvements des acteurs de son écosystème, les changements réglementaires, les innovations technologiques.. Vous connaissez tous la liste des typologies de veille couramment en place dans les organisations.

    Bien que le signal faible ait toujours été présenté comme le graal des démarches de hashtag#veille et d’intelligence économique, je pense qu’il serait temps de reconnaitre que les dispositifs de hashtag#veille n’ont que rarement les moyens de les révéler et ce, que l’on parle :
    – des moyens d’exploration et de détection : il s’agit de nouvelles activités et processus à mettre en place, de nouvelles sources à explorer (veille sur pratiques émergentes, littérature de science fiction, veille au coeur des écosystèmes et événements créatifs, interview…), d’une nouvelle diversité d’expertises et compétences à associer à de telles activités ..
    – des moyens de retranscription, partage au sein de son organisation : la veille à un potentiel d’être un briseur de tabous mais les livrables de veille et d’analyse sont souvent neutralisés.

    hashtag#pavédanslamarre De nombreux freins organisationnels mériteraient d’être levés afin que la fenêtre d’Overton puisse avoir son effet d’accompagnement de la transition sur les profils décideurs.

    Nous pouvons penser notamment à :
    – reconnaissance, valorisation de ces activités, budget et soutien organisationnel associé
    – l’absence de lien direct entre les processus de veille et les décideurs, et donc,
    – la difficulté de remonter des signaux réellement faibles, voire fantaisistes à un moment donné mais qui pourraient éclairer sur un futur possible. Ne parlons même pas de la difficulté lorsque ces signaux qui remettraient en cause des stratégies en cours et décisions prises,
    – l’auto-censure interne,
    – la réalité des prises de décisions en entreprise qui assez souvent peuvent sembler mieux servir certains intérêts individuels que l’organisation elle-même.

    Merci Quentin Ladetto pour ce billet qui montre à nouveau le besoin de marier les processus de hashtag#veille et de hashtag#prospective

    • Merci pour ton message. Je ne peux que aller dans ta direction, et c’est pour cela que j’utilise souvent le terme de « dispositif de prospective (ou d’anticipation) » gentiment emprunté à Thomas Gauthier.

      Un dispositif est une multitude d’activités, de personnes qui captent des signaux, les formatent en récits, design-fiction et autre, pour ensuite les diffuser aux parties prenantes pour en faire quelque-chose!

      C’est cette dernière étape qui, à mes yeux, est la plus complexe, et très sincèrement, avec laquelle j’investis une énergie non négligeable ! C’est compréhensible car cela change les habitudes, les façons de faire… que de défis dans la pratique !

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