Q121 | Pourquoi et comment considérer les brevets dans des activités d’anticipation ?

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Selon l’article qui lui est consacré dans Wikipédia, un brevet est “un titre de propriété industrielle qui confère à son titulaire un monopole d’exploitation sur l’invention brevetée à compter, en principe, de la date de dépôt et pour une durée maximale de 20 ans”.

Concrètement, une entreprise brevette une invention lorsqu’elle veut s’assurer qu’aucune autre entreprise, en particulier concurrente, ne pourra s’en servir.

Pour être valide, un brevet doit décrire très précisément l’invention qu’il vise à protéger. Ensemble, tous les brevets déposés par toutes les entreprises donnent ainsi à voir, en théorie en tout cas, les futurs technologiques auxquels nous pourrions nous attendre.

Sans rentrer dans le détail des stratégies mises en oeuvre par les entreprises, il est important néanmoins d’être attentif au fait que tous les futurs technologiques qui sont en train d’être façonnés dans les départements de recherche & développement des entreprises du monde entier ne sont pas forcément décrits dans les bases de données de brevets. Parfois, une entreprise préférera protéger son invention en usant du secret commercial, un ensemble de procédures visant à garantir qu’aucune information relative à l’invention ne filtrera en-dehors de l’entreprise. Certains futurs technologiques possibles, donc, ne sont connus que de leurs inventeurs.

Les brevets représentent une source indéniable d’informations sur les innovations à venir, que celles-ci soient technologiques ou non. Bien entendu toute innovation n’a pas nécessairement un brevet lui correspondant, mais il serait dommage de se passer de cette source d’information. Il est également important de noter qu’une demande de brevet sera visible environ 15 mois seulement après son dépôt. Il s’agit d’une limitation potentielle dont il faut être conscient dans la lecture des différents livrables liés aux brevets.

Les bases de données de brevets, telles que celle mise à disposition par l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle, présentent l’avantage d’être très structurées. Il est alors possible de construire des requêtes sophistiquées afin d’identifier un corpus spécifique de brevets, puis de les télécharger et de les analyser au moyens d’outils propriétaires ou sous licence libre. Le gros avantage par rapport à différents autres types d’information comme les articles, les livres, les blogs, est que celui-ci est structurée et classifié de façon définie à l’échelle internationale. Ceci facilite (ou du moins le devrait) l’automatisation de certaines analyses ainsi que traitement informatique et statistique des données fournissant de nombreux indicateurs (auteurs, pays, entreprises, thèmes adjacents, collaborations etc). Dans la pratique, on se rend vite compte que cela est loin d’être évident de part la grande hétérogénéité des descriptions, conséquence parfois des divers stratégies d’entreprises utilisées pour le dépôt de brevets.

Dans le cadre des activités d’un programme de prospective technologique, il y a deux grands types de situations dans lesquelles une recherche en brevets peut s’avérer utile.

Premièrement, vous vous intéressez à un thème précis, par exemple, les les dispositifs électroniques intégrés aux lentilles de contact. Dans ce cas, vous êtes vraisemblablement à la recherche d’informations précises sur les entreprises, instituts publics de recherche etc. qui déposent des brevets car vous envisagez peut-être de proposer une collaboration à l’un d’entre eux ou au contraire, vous souhaitez vous assurer que la propriété intellectuelle que détiennent collectivement vos concurrents ne vous interdira pas de lancer un nouveau produit ou service.

Deuxièmement, vous souhaitez acquérir une vision panoramique des futurs technologiques possibles à l’intérieur d’un domaine aussi vaste que l’intelligence artificielle, les missions spatiales habitées ou encore la géo-ingénierie. On dit alors que vous construisez un paysage de brevets ou landscape. De tels landscapes sont librement disponibles, à l’instar de l’étude conduite par l’organisation mondiale de la propriété intellectuelle (WIPO) sur les futurs possibles de l’intelligence artificielle.

Sauf à souhaiter devenir expert en analyse de brevets, il est conseillé de faire appel aux services d’une société spécialisée dans la propriété intellectuelle. Même si vous avez l’impression qu’un outil librement accessible et relativement intuitif tel que Google Brevets vous permet d’obtenir les informations que vous cherchez, vous réaliserez vite que le diable est dans les détails et que les résultats de votre recherche ne sont peut-être finalement pas à la hauteur de vos attentes.

  1. Selon les thèmes traités une recherche retourne facilement plusieurs dizaines de milliers de résultats (c’est le corpus de brevet évoqué plus haut). Une telle quantité d’information ne peut pas être analysée manuellement.

  2. Afin de calculer vos indicateurs (acteurs principaux, accélération d’un domaine technologique, distribution géographique des brevets, etc.) vous allez devoir considérer un corpus de brevets. La pertinence des brevets faisant partie de celui-ci est primordial. Les avez-vous tous contrôlés?

  3. Les brevets appartiennent à des individus, des institutions publiques (par exemple, des universités)ou des entreprises. Or ces dernières se retrouvent régulièrement au coeur de transactions diverses et variées – vente, fusion, acquisition, rattachement à une holding, changement de dénomination etc. – et elles apparaissent régulièrement, y compris dans les bases de données de brevets, sous différentes appellations (par exemple, IBM vs. International Business Machine). D’où la question essentielle à laquelle vous ne manquerez pas de devoir répondre: à qui appartiennent vraiment les brevets ? Attention aux fausses conclusions !

  4. Les brevets sont rédigés la plupart du temps dans la langue du pays dans lequel ils sont déposés, et pas tous en anglais ou français!

  5. Les bases de données de brevets sont riches de plusieurs dizaines de millions de documents. Construire des paysages de brevets et en tirer rapidement des premiers indicateurs n’est, à première vue, pas si compliqué. Gardez néanmoins en tête cet adage prisé par les statisticiens et autres data scientists : garbage in, garbage out. Dit autrement, il est essentiel que vous accordiez un soin tout particulier à la constitution de votre corpus de brevets au risque de produire des landscapes et des indicateurs peut-être réussis du point de vue esthétique, mais totalement inutiles dans le contexte de votre programme de prospective technologique.

 L’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle met également à disposition des guides (en anglais) sur comment utiliser un set de brevets –The WIPO Patent Analytics Handbook – ainsi que sur les outils Open-Source à disposition pour traiter les brevets –The WIPO Manual on Open Source Patent Analytics.

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1 Comment

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