Q126 | Comment construire des scénarios en suivant une approche mathématique ?

18 février 2020
3 mins de lecture

Comme rappelé dans un précédent billet, l’analyse structurelle vise à “se doter d’une représentation aussi exhaustive que possible du système et de réduire la complexité de celui-ci aux variables essentielles”. 

En d’autres termes, il s’agit de décomposer le sujet d’étude au moyen d’outils formels, tels que des matrices. Il devient alors possible, en théorie, d’analyser une à une toutes les interactions entre les variables politiques, économiques, sociales, technologiques, écologiques, etc.

L’analyse structurelle se différencie de la logique intuitive en cela que cette dernière mobilise essentiellement l’imagination pour construire plusieurs scénarios plausibles.

Les différentes étapes de l’analyse structurelle sont les suivantes :

Analyser l’environnement de l’organisation “cliente” puis sélectionner les facteurs clés à retenir pour les prochaines étapes ;
L’organisation “cliente” peut être un client externe, si vous opérez par exemple depuis un cabinet de conseil, ou un client interne, si vous êtes mandaté par un autre département ou un autre service au sein de votre organisation pour mettre en oeuvre une démarche de prospective.

Construire des trajectoires futures possibles pour chaque facteur clé identifié ;
En règle générale, chaque facteur clé fera l’objet de 3 ou 4 projections. Dans le cas d’un facteur économique, par exemple le niveau des inégalités au sein d’une population, on pourra retenir 3 hypothèses, donnant lieu à 3 projections : les inégalités stagnent, elles se réduisent drastiquement, et enfin elles explosent.
Comment les facteurs clés pourraient-ils évoluer à l’avenir ?
Les développements futurs possibles – appelés projections futures – sont maintenant développés et formulés pour chaque facteur clé. Les projections futures décrivent des alternatives de développement stratégiquement pertinentes, caractéristiques et qualitatives des différents facteurs clés.

Construire des scénarios de futurs possibles pour l’ensemble du système étudié ;
Les scénarios sont ainsi créés “mécaniquement” à partir de plusieurs combinaisons de trajectoires futures possibles pour chaque facteur clé. En pratique, le prospectiviste se retrouve rapidement face à une difficulté : il existe un nombre très élevé de combinaisons possibles et il va donc falloir arbitrer en ne développant que quelques scénarios.

Analyser les scénarios développés à l’étape précédente et comprendre leur impact potentiel pour l’organisation “cliente” (son identité, sa stratégie, son positionnement concurrentiel, sa gamme de produits, etc.) ;
Les scénarios peuvent éclairer l’organisation “cliente” de différentes manières. Par exemple, dans le cas où l’organisation aurait à choisir parmi deux options stratégiques, incompatible l’une avec l’autre, il serait pertinent de mettre en place un “test en soufflerie” qui consiste essentiellement à mettre à l’épreuve des scénarios de futurs possibles de deux options pour voir laquelle se montre la plus pertinente quelque soit le contexte dans lequel l’organisation pourrait être amenée à évoluer. Une gamme plus complète d’applications possibles des scénarios sera développée dans un prochain billet.

Différentes étapes dans la réalisation de scénarios en considérant et évaluant les facteurs clés de l’écosystème thématique. Les étapes de réflexion sont similaires à celles considérée dans l’établissement des “roadmaps” et peuvent naturellement être menées en parallèle.
(Illustration adaptée de Scenario Management International AG)

Dans le cadre du programme de prospective DEFTECH, nous avons adopté cette méthodologie afin de rédiger différents scénarios pour le futur du domaine spatial (en allemand). 
Ceci nous a permis de trouver de mettre en évidence par exemple que le scénario considéré comme le plus probable de se réaliser n’était pas celui souhaité. Connaissant les valeurs des facteurs clés caractérisant chacun d’eux, il est désormais possible d’agir sur ceux-ci pour influencer le futur vers lequel nous nous dirigeons en connaissance de cause.

Représentation graphique des différents scénarios considérés. On remarque ici que les scénarios probables ne se superposent pas avec le scénario souhaité. Il est alors possible d’analyser les facteurs clés menant à cette situation et d’agir sur ceux-ci.

2 Comments Laisser un commentaire

  1. La représentation est très explicite, mais comment intégrer la pondération de l’incertitude qui résulte des variables citées. En réalité la projection des trajectoires résultant de toutes les interactions (Etape 2->3) entre les variables devrait être représentée par un cône plus ou moins élargi à la place du trait, non ?

    • Bonjour Olivier,

      Merci pour le commentaire!

      S’il y a bien de l’incertitude dans les étapes 1 et 2 pour la sélection et la pondération des facteurs clés, les variables obtenues sont reprises telles quelles entre l’étape 2 et l’étape 3. Il s’agit donc bien d’un trait.

      L’incertitude est bien entendu présente « partout », et c’est pourquoi le choix des personnes participant aux deux premières étapes est crucial afin de bien définir l’écosystème de travail.

      Ce qui est intéressant avec cette méthode, et qui n’est pas vraiment possible avec la méthode de la logique intuitive, c’est que malgré l’incertitude relative aux facteurs considérés, tu as explicitement leur valeur pour chaque scénario.
      En conséquence, tu sais sur quoi agir pour passer d’un scénario à un autre.

      J’espère n’avoir pas introduit plus d’entropie que nécessaire avec cette réponse!

      Bien à toi,

      Quentin

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